Les dernières années : M. Kingsley, l’activisme électoral et la censure

Le Federated Labor Party (Parti travailliste fédéré), ou FLP, a été fondé au printemps de 1918. À cette occasion, Eugene Kingsley réapparu sur la scène électorale comme chef de parti, rôle qu’il avait délaissé depuis 1911, alors qu’il était membre du comité exécutif du Socialist Party of Canada (Parti socialiste du Canada), ou SPC. Le FLP regroupa différentes factions du socialisme de gauche en Colombie-Britannique durant une période particulièrement éprouvante de la Première guerre mondiale. Il tenta de créer un programme qui unirait les politiques des travaillistes progressistes et des socialistes révolutionnaires. Selon l’opinion populaire, la révolution politique du SPC avait échouée. De plus en plus, les manifestations industrielles et les grèves générales des organisations syndicales industrielles étaient au premier plan. Dans ce contexte d’insatisfaction généralisée, le FLP a été fondé pour conférer une influence politique réelle à ses idéaux, de sorte à utiliser la colère ouvrière pour accroître la participation politique.

Rencontre du Parti travailliste fédéré à Victoria, en 1918. Après avoir quitté le Parti socialiste, M. Kingsley aida à fonder cette nouvelle organisation politique. Rencontre du Parti travailliste fédéré à Victoria, en 1918. Après avoir quitté le Parti socialiste, M. Kingsley aida à fonder cette nouvelle organisation politique.
Alors qu’il détenait le titre de vice-président du FLP, M. Kingsley présenta sa candidature pour devenir un candidat sous la bannière du parti. Dès le début de sa carrière politique à San Francisco, E.T. Kingsley fut fidèle à ses idéaux et présenta sa candidature au Congrès en 1896 et 1898. Son plus grand accomplissement électoral fut dans la ville de Vancouver, en Colombie-Britannique, lorsqu’il remporta 18 % du vote aux élections provinciales partielles de 1907 auxquelles William Bowser, futur premier ministre, se présenta comme candidat du parti libéral. Bien que M. Kingsley n’eut jamais le même succès que d’autres socialistes aux bureaux de scrutin (dont quatre ont été élus à l’assemblé législative provinciale de 1903 – moment auquel le SPC fut fondé – au début de la guerre), il continua à présenter sa candidature aux élections, avec ou sans appui électoral, jusqu’en 1926 alors qu’il approchait l’âge de 70 ans.

La censure et la répression étatique du socialisme radical durant la Première guerre mondiale et l’émergence du Bolchévisme en Russie ont créé, à la fois, des nouveaux défis et des nouvelles occasions pour les activistes tels M. Kingsley. En septembre 1918, le Secrétaire d’État du Canada a interdit la publication du Western Clarion, lorsque les gouvernementaux provincial et fédéral ont profité de la guerre pour faire taire la sédition et la dissension. Bien que le Western Clarion fut rapidement remplacé par le Red Flag pour échapper aux règlements de censure. M. Kingsley saisit l’occasion et, en janvier 1919, il commença la publication de son propre quotidien, le Labor Star.

Malheureusement, le Labor Star ne connut qu’un bref succès. Accablé de problèmes de circulation et de faibles chiffres de vente, il publia sa dernière édition en mars 1919. Ce fut le dernier projet de publication d’envergure auquel M. Kingsley participa. Le Labor Star cherchait à guider vers des fins politiques la classe ouvrière qui devenait de plus en plus radicale, ainsi que les soldats qui revenaient du front, et portait un regard septique sur le mouvement travailliste industriel des grèves générales de Vancouver et de Seattle. Ce journal s’intéressait davantage au socialisme d’une vue d’ensemble, ainsi qu’à la scène mondiale, n’hésitant pas à caractériser la Révolution russe d’événement démocratique et ordonné, analogue même à la révolution politique dont il parlait. Mais compte tenu de l’élan révolutionnaire grandissant dans l’Ouest du Canada qui mena à la Grève générale de Winnipeg et aux grèves de solidarité qui éclatèrent partout au pays plus tard, au printemps, le message de M. Kingsley prônant la retenue et la participation politique n’était pas de l’heure. Les doutes qu’éprouvaient M. Kingsley par rapport aux organismes tels One Big Union (un grand syndicat) ont été, en grande partie, ignorés.

En février 1919, le Vancouver Sun émit des rapports portant sur une « conférence de paix » entre les représentants de la ville, les travailleurs, les socialistes et les soldats qui démontrent ce changement d’attitude. En raison de l’augmentation des activités du mouvement ouvrier et des manifestations de masse, la ville et la province étaient aux prises avec des tensions volatiles. L’élite politique tenta de calmer ces tensions en assurant aux socialistes qu’ils avaient une place dans la vie politique de la communauté, tant qu’ils s’exprimeraient en votant et qu’ils arrêteraient d’inciter la sédition. Mais les paramètres de la dissension sociale de cette époque étaient tels que les anciennes politiques du SPC n’étaient plus d’à-propos. Plusieurs années s’écoulèrent avant qu’un socialisme nettement politique ne gagne en popularité, malheureusement trop tard pour que M. Kingsley puisse en témoigner.

à côté: La contribution de M. Kingsley au paysage politique canadien
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